La stratégie de spécialisation intelligente S3 de La Réunion : renforcer la résilience du territoire

Publié le 31/03/2020

Si le changement climatique concentre les inquiétudes, l’effondrement de la biodiversité à l’échelle mondiale constitue un péril tout aussi important. Cette destruction s’opère à un rythme plus de 1000 plus rapides que lors des dernières grandes extinctions : une espèce toute les 20 minutes, 30 000 par an. Et les îles paient un lourd tribut : depuis le XVIIe siècle, les espèces insulaires endémiques animales et ornithologiques représentent respectivement 75 et 90% des extinctions. Or, la préservation de 25 hotspots mondiaux, représentant moins de 2% de la superficie terrestre suffirait à protéger la moitié des plantes vernaculaires connus. Grâce à la diversité de ses milieux et à la qualité des savoir-faire développés notamment lors de projets de restauration Life+, La Réunion peut devenir un centre de référence mondiale.


Contexte et objectifs 
La reconnaissance de l’exceptionnalité écologique de La Réunion impose une gestion spécifique de ce patrimoine unique au monde, au service du développement économique de la population réunionnaise. Ces milieux uniques, largement défrichés au cours des trois derniers siècles et désormais réduits à un tiers du territoire, sont aujourd'hui menacés par leur envahissement par de nombreuses espèces exotiques, devenues envahissantes.


Le potentiel d'attraction touristique majeur que représentent ces écosystèmes doit être préservé par d'ambitieuses mesures de restauration écologique autorisant le développement de filières économiques et scientifiques créatrices d'emplois, de connaissances et de valeur ajoutée.


La formidable richesse floristique de l'île, largement endémique et dont le potentiel en terme d'extraction et d'utilisation dans la pharmacopée est encore sous-valorisé, malgré un savoir-faire et des pratiques populaires encore vivaces, doit être conservée, étudiée et multipliée.



La restauration écologique de ce patrimoine végétal passe par la lutte contre les espèces exotiques envahissantes, enjeu planétaire, encore exacerbé dans les systèmes insulaires tropicaux, et sur lequel l'île de La Réunion a vocation à se positionner comme territoire d'excellence dans la recherche et la mise en œuvre de techniques innovantes.


Les actions de lutte actuelles sont de loin insuffisantes, permettant au mieux de ralentir une expansion trop rapide des espèces exotiques. Il est donc important d'identifier et de développer l'ensemble des moyens de lutte envisageables, contre les espèces exotiques envahissantes, afin de restaurer au mieux notre patrimoine naturel et développer une expertise et un savoir-faire exportables dans d’autres régions tropicales confrontées aux mêmes problématiques.


La plantation à grande échelle d’espèces indigènes est indissociable de ce travail de lutte contre les espèces envahissantes afin d’en consolider les résultats. L'implication de la société civile dans les futurs projets de restauration-conservation est une étape primordiale pour assurer leur succès et doit permettre la création d’emplois grâce à des actions très demandeuses en main-d’œuvre (lutte, production de plants indigènes, plantations). Des actions de plantations d'espèces indigènes pour une utilisation durable par la population ont déjà été initiées par certains acteurs publics. Elles devraient être systématisées pour permettre une réappropriation par tous de ce patrimoine végétal et offrir de véritables possibilités de développement d’une filière économique liée à sa valorisation



Répondant à la fois à des besoins en pleine croissance et aux enjeux territoriaux, cette spécialisation devrait s’imposer comme une niche d’activité déterminante :


Par ses effets : rétablissement des services écologiques (climat, précipitations, maintien des sols, aquifères, etc.)
Par sa très forte intensité en savoirs spécialisés et aussi en travail peu qualifié (élimination d’espèces invasives, replantations, suivi, etc.)
Par sa dimension socioculturelle et identitaire forte
Par son fort potentiel touristique : conforter l’image éco-touristique de l’île grâce à des corridors agissant comme des zones tampons entre les espaces urbains et le cœur de parc.


Description des actions
Cette fiche action s’articule autour de deux axes complémentaires : 


Faire de La Réunion un territoire d’excellence en matière de restauration écologique des écosystèmes tropicaux


Pour structurer cette spécialisation, deux actions complémentaires seront poursuivies. D’une part, le développement d’un savoir-faire scientifique et technique exportable dans : 


-La capacité de détection précoce / de caractérisation de la qualité des habitats
-L’identification de luttes biologiques et de leurs modalités de mise en œuvre, intégrant une analyse ex-ante des impacts potentiels ;
-Le développement de techniques innovantes de restauration ;
-L’amélioration de l’efficacité des protocoles de lutte existants ;
-Le développement d'outils de suivis à grande échelle (intérêt de plantations d'espèces indigènes au cours du temps).
-Il s’agit notamment d’initier une dynamique de recherche scientifique à l’échelle régionale et de proposer une offre de formations adaptées.


D’autre part, la mise en œuvre à grande échelle d’actions de conservation des milieux naturels préservés et de restauration de terrains anthropisés/dégradés. Les types d’actions de conservation et de restauration dépendront notamment de la localisation et du degré de dégradation de la zone cible :


a. les zones urbanisées : réaliser des plantations d'espèces indigènes afin d’améliorer la conservation de nombreuses espèces animales et végétales et d’en permettre une exploitation par la population (utilisation dans le cadre de la pharmacopée locale). Démarche pour laquelle il serait nécessaire d’intégrer les associations de quartiers notamment, dans une logique d’innovation sociale.


b. les zones secondarisées (envahies) à la frontière des milieux naturels intacts : mobiliser les propriétaires de ces terrains pour la mise en œuvre d’actions de restauration. Cette mobilisation des propriétaires fonciers, dont une grande partie d'agriculteurs, impose des innovations dans la prise en compte de ces enjeux : valorisation économique des services environnementaux rendus par l'agriculture, dans le cadre de mesures financières incitatives (MAEC ou autres),ou de communication positive sur les pratiques de l'exploitation agricole vis à vis de la biodiversité (marques, labels …).


c. les zones secondarisées (envahies) peu accessibles (pente > 30%) mais en grande partie classée aujourd'hui au Patrimoine mondial : introduction d'agents de lutte biologique contre les espèces les plus envahissantes et mise en place d'actions de restauration innovantes (hydroseeding...);


d. les milieux naturels, faiblement à fortement envahis : conservation de ces espaces à fort potentiel touristique et qui assurent de nombreux services écosystémiques.



Développer et structurer une filière économique créatrice d’emplois et de valeur ajoutée autour des actions de restauration des milieux naturels


La demande qui découlera des actions précédentes, en plants et en savoir-faire notamment, servira de tremplin pour la création ou le développement d’entreprises ou d’associations spécialisées dans :


-la production d’espèces indigènes, aujourd’hui peu multipliées ; méthodologie à appliquer pour le respect des écotypes, la traçabilité des plants, la production (amélioration des taux de germination des semences, de leur taux de survie une fois replantées en milieu naturel, vitro-plants … )
-la fourniture de semences indigènes 
-la lutte contre les espèces exotiques, la plantation forestière et l’entretien qui en découle ;
-le conseil pour la mise en œuvre de ces actions (choix des zones à restaurer, des espèces à replanter, de la méthodologie à suivre, etc) ;
-l’export de formations
-l’exploitation des essences replantées (tisanerie, artisanat, apiculture ...) et des principes actifs issus de la biodiversité tropicale. 
-le développement de produits écotouristiques 

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